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Stages à Bangui, le chemin de Golgotha

source: www.tesson.info

Si Golgotha signifie pour les chrétiens la souffrance de Jésus, trouver un stage pour les étudiants fréquentant les établissements professionnels de Bangui est pire qu’un chemin de la croix.  Je garde encore des amers souvenirs de la première fois que je recherchais un stage pour valider mon DUT, mention Génie Informatique. J’aurais dû avoir un parcours pareil à celui du Panda. Dieu ! J’ai eu quand même un peu plus de chance.

« Utilisez vos relations, vous devez soutenir vos Rapports de Stage d’ici cinq mois ». C’est en  disant cette phrase que le Chef de Département Génie Informatique de l’IST (Institut Supérieur de Technologie), M. Bernard BRES, tendait les demandes de stage à chacun de ses étudiants de 2ème année DUT, en Juin 2007. Je faisais parti de ces étudiants et je ne mesurais pas encore l’ampleur de la situation. Or, c’était pour moi le début d’un calvaire qui me conduira au cœur des réseaux (presque même des lobbyings) que forment les gourous chargés des Ressources Humaines des entreprises de la place. Au bout de dix demandes de stages placées en un mois, je me suis retrouvé avec un entretien sans suite et une réponse défavorable. Les autres courriers sont restés lettres mortes, surement perdus entre les guérites des entreprise cibles et leurs secrétariats. Ici, on ne vous fait même pas un sourire quand vous venez déposer une demande de stage. Pendant cette période, les taxis de Bangui ont fait bonne affaire envers moi et je me suis retrouvé sans un sou (presque) à courir chaque jour après un stage qu’il me fallait pour valider mon année. Au fur et à mesure j’apprenais à formuler des chutes de plus en plus contraignantes sur mes « demandes de stage ». …Dans l’attente d’une suite favorable… Dans l’espoir… Veuillez agréer mes considérations les plus hautes… Je vous serais disponible pour d’amples informations… Mais hélas, la quasi-totalité des entreprises de Bangui susceptibles de m’accueillir  ont reçu mes demandes mais pas de stage à l’horizon. Je ne voulais pas non plus me retrouver avec un sujet à traiter à la maison, car c’est l’alternatif au cas où je ne trouvais pas de stage.

A Bangui où je n’avais mis que deux ans, je n’avais pratiquement pas d’autres connaissances hormis le milieu universitaire. Le temps imparti pour débuter les stages était passés d’un mois et toujours rien pour moi.  Un matin je m’étais résolu de me trouver un stage quelque soit le prix, mais en toute loyauté. Tôt le matin, j’avais empoché mon passeport, mis dans une chemise mes paperasses (demande de stage, relevés de notes, CV…) et foncer droit vers l’ambassade du Tchad en Centrafrique. Une phrase retentissait dans ma tête : « …Utilisez vos relations… ». Moi je n’en avais pas et il me fallait en créer et ce sur le champ. Je m’étais présenté à la guérite de l’ambassade, le portail m’était tout de suite ouvert. Ma politesse en était pour quelque chose. Tout timidement, je m’étais dirigé à l’accueil ou plutôt le secrétariat qui en faisait office. J’avais demandé à entrer en contact avec le Chargé d’Affaire qu’on m’avait dit être occupé, puis malicieusement j’avais pu entrer en possession du numéro de son téléphone mobile. A quoi bon ? M’était-je dis. J’étais reparti voir la secrétaire pour lui demander de m’introduire chez l’Attaché Culturel que j’avais vu faire direction vers son bureau.

-Entre mon fils, m’avait dit l’attaché culturel.

-Prends la chaise là-bas.

Le bureau était spacieux, plein de symboles tchadiens étaient accrochés aux murs. La photo du président DEBY était mise en évidence. De mon voyage « mural », l’Attaché Culturel m’avait stoppé en me lançant en arabe :

-Alors que puis je faire pour toi

-Cher papa, je ne suis pas venu vers toi pour rien. Je m’excuse de te déranger en plein travail, mais sache que ce n’est pas pour rien.

Pour dissiper tout préjugé que portent les autorités de l’ambassade envers les étudiants tchadiens, comme quoi ils ne passent par là que pour quémander de l’argent, je continuais.

-… ce n’est pas de l’argent que je suis venu demander, mais c’est un stage que je cherche. Cela fait près de quatre mois que je cherche sans succès et Papa, tu es mon dernier rempart.

-Un stage ? Mais tu sais bien qu’ici nous ne pouvons t’accueillir pour un stage. D’ailleurs vous les étudiants tchadiens vous ne voulez pas fournir d’effort. Toujours à demander de l’aide. Je suis sûr que tu as déposé une seule demande et tu es rentré dormir chez toi. N’est-ce pas ? M’interrogea-t-il autoritairement.

-Non ce n’es pas le cas Papa. Je suis à ma 27ème demande et sincèrement je suis moralement abattu car certains de mes collègues tendent à la fin de leurs stages. Je suis le seul à ne pas en trouver, car ici à part vous ici à l’ambassade, je n’ai personne.

-Bon dis moi ce que je peux faire, dans quelle entreprise veux-tu faire ton stage ? D’ailleurs que fais tu à l’Université ?

-Je suis en 2ème année de Génie Informatique, mais je préfère des structures Telecom, du genre « Opérateur de téléphonie mobile ».

-Il y en a plein à Bangui. Es tu déjà aller vers quelques uns ?

-Oui, Nationlink, Telecel et Orange. Ils ne m’ont même pas répondus.

-Bon… je te rédigerais un « soit transmis » c’est tout ce que je pourrais faire pour toi. Tu m’indiqueras l’entreprise que tu cible et le reste ce sera à toi de jouer. Ça te va ?

-Oui excellence, répondis-je.

Faute d’encre pour imprimer la note dans l’immédiat, je m’étais vu dans l’obligation de repasser le lendemain dans l’après-midi prendre la lettre qui était directement adresser au Directeur Général de l’entreprise que je convoitais. Sur la feuille, le cher cachet à l’effigie de Kélou Bit al Diguel (Kélou la fille de Diguel. Fille de la période coloniale au Tchad, à l’éffigie de laquelle sont basées les sceau du pays) de mon pays régnait en maître. Une fierté tchadienne. J’étais aussitôt partis déposer le courrier, le cœur serré mais avec plus d’assurance que les autres fois.

C’était un Mercredi après-midi que j’avais déposé le courrier. Le lendemain, jeudi matin, mon téléphone sonnait, l’appel était masqué. J’avais répondu et de l’autre bout des ondes, une voix féminine m’avait salué et demandé respectueusement si j’étais bien M. ASSANI. Tout en sursautant de joie, j’ai répondu par l’affirmatif et la voix me disait que le DT (Directeur Technique) de sa compagnie demandant à me voir le lendemain pour un entretien. Mon Dieu ! Ça a marché. Merci attaché culturel, merci « idée de génie ».

J’avais pu passer mon entretien quatre jours après le rendez-vous, faute de disponibilité du DT. Et mon admission au stage était rendue possible trois mois plu tard. J’avais pu  ainsi échapper à un stage au Laboratoire de l’IST et à un simple projet tutoré. Ma soutenance c’était déroulé un mois après le stage. En conclusion j’avais passé quinze mois pour décrocher mon DUT.

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Auteur·e

assaaz

Commentaires

Nad
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merci d'en parler, car le stage est devenu diamant rose à Bangui

Ramses wrangler
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Ca c'est la vraie verite, car moi aussi j'ai ete victime de cette maladie a la centrafricaine. Pour trouver un stage pratique apres la 2eme (DUT) et 3eme (LPAMSI) est un vrai calvaire pour les etudiants qui n'ont pas de relation.... bref....Mais apres ces entreprises qui n'ont pas pu t'aider dans le processus de ta formation, elles vont te recruter pour t'utiliser.... la faute aussi appartient a nos dirigeants. Si les structures de suivi qui sont mis en place font leur travail, nous les pauvres etudiants n'auront pas de probleme... hellas. C'est a nous qui avons subi ces choses d'eviter ca a nos petits freres a l'avenir.